Un peu moins de trois ans se sont écoulées depuis la sortie de "Another Page", lorsque paraît "Every Turn Of The World" en novembre 1985 ! Et en trois ans, beaucoup de choses ont changé dans le paysage musical ! Durant les années 83/84, les "majors" ont fait le ménage dans leur catalogue en dégageant beaucoup d’artistes et de groupes pas assez "bankable" ! Pour la grande majorité ce sont des artistes étiquetés "soft-rock", dont les albums ont du mal à se vendre, au regard de l’évolution du music-business et des nouveaux goûts musicaux de la jeune génération. La pop anglaise synthétique, le "hard-rock", le nouveau "funk", le "rap" émergeant, sont les genres dont les jeunes raffolent, MTV et certaines radios US ne sont pas étrangers à ce revirement de situation et leurs playlists font office d’Evangiles !
Il faut aussi convenir que la plupart du temps, le genre "soft-rock" se marie mal avec les nouvelles technologies et les possibilités qu’offrent les programmations et les nouveaux sons développées par les synthétiseurs ! On peut aussi expliquer cette baisse qualitative par des manques ou des pannes d’inspirations de la part de toute une génération d’auteurs-compositeurs-interprètes, plus obnubilés par les nouvelles possibilités sonores que proposent les studios d’enregistrements que par la réelle volonté de composer une bonne chanson !
Certains artistes "soft-rock" sentant le vent tourner, se sont recyclés dans la "Country Music" nashvilienne, genre plus lucratif, du moins pour les Etats-Unis, et qui a souvent gardé une production beaucoup plus organique et traditionnelle.
Mais revenons-en à "Every Turn Of The World" et à la manière dont Christopher Cross a essayé de survivre artistiquement à ce bouleversement, aidé en cela par son fidèle producteur Michael Omartian! La première constatation qui s’impose est que cet album prend le contre-pied de "Another Page" auquel on pouvait peut-être reprocher d’être trop "soft", cette fois-ci on ne fait pas dans la dentelle et la sensibilité, ça va bouger ! L’artwork de la pochette est d’ailleurs très parlant à ce sujet-là, exit le flamand rose et place à la voiture de course, ce qui sous-entend que nous allons avoir à faire à des morceaux qui vont "vites" ! Ce troisième opus est effectivement le plus "rock" de Christopher Cross, et même aujourd’hui encore, c’est son œuvre la plus "up-tempo" ! En effet on ne dénombre que trois ballades sur les dix chansons qui le compose ! Contrairement à "Another Page" où tous les morceaux sauf un, étaient signés par lui seul, cette fois-ci il s’est largement fait aider dans l’écriture des chansons, les paroliers Will Jennings et John Bettis sont très présents tout au long de l’album !
Malgré tout cela, "Every Turn Of The World" sera son premier vrai échec commercial, il n’atteindra que la 127e place du Billboard 200 et seul le single "Charm The Snake" fera son entrée dans le Billboard Hot 100 à une modeste 68e place ! Dans notre pays, mis à part les fans, cet album passera quasiment inaperçu !
Artistiquement c’est bien évidemment son album le plus faible comparé au premier et à "Another Page". On y découvre quand même de très bons morceaux, mais l’ensemble manque d’homogénéité, et certaines compositions restent malgré tout bien en-deçà de ce à quoi il nous avait habitué.
On débute avec le titre éponyme "Every Turn Of The World" (Christopher Cross / Michael Omartian / John Bettis), qui est tout en puissance ! Il fut choisi comme premier "single", avec un clip vidéo tourné avec des moyens et fabriqué pour MTV ! C’est une bonne chanson où les simmons drums et les synthétiseurs règnent en maître, on y remarque une section de cuivres arrangée par Michael Omartian, ainsi que la guitare de Christopher Cross pour un très bon solo ! Le refrain est accrocheur et plutôt bien fait, mais malheureusement ce morceau n’entrera même pas dans le Billboard Hot 100 ! Je suis beaucoup plus circonspect concernant "Charm The Snake" (Christopher Cross / Michael Omartian), toujours avec un côté "rock" avéré, la voix de Cross est acérée ainsi que sa guitare, mais la mélodie est plutôt bâclée. Quand on pense que c’est le "simple" qui a le mieux marché ! Je trouve que ce morceau est beaucoup plus faible que le premier single "Every Turn Of The World", c’est un titre mineur et que l’on peut oublier. Je ne dirais pas la même chose de "I Hear You Call" (Christopher Cross / Michael Omartian / John Bettis) qui évolue toujours dans le "rock". C’est une bonne chanson avec des couplets et un refrain accrocheurs, qui ne laissent pas indifférents et impriment une trace quelque part dans votre tête dès la première écoute ! "Don’t Say Goodbye" (Christopher Cross / Billy Alessi / John Bettis) est en revanche loin d’être inoubliable, ça commence comme une ballade pour ensuite déboucher sur des couplets hésitants et tout à fait passables et pour ne rien arranger le refrain est loin d’être remarquable ! "It’s You That Really Matters" (Christopher Cross / Will Jennings) est la première ballade qui nous est proposée et qui concluait la face un du vinyle. C’est un beau morceau, où l’on retrouve le Christopher Cross que l’on avait aimé sur les deux premiers albums !
"Love Is Love (In Any Language)" (Christopher Cross / Michael Omartian / John Bettis) ouvrait la seconde face, dans un "mood" très "world music". Après avoir dit ça, ce n’est pas non plus un moment inoubliable, mis à part peut-être le refrain qui comporte des ingrédients à même de plaire à un certain public ! Les cuivres sont aussi présents, mais ça ne suffit pas à en faire un classique ! "Swing Street" (Christopher Cross / Michael Omartian / John Bettis) est un titre de seconde zone. Up-tempo barbant et sans intérêt ! Enfin un éclair sur cette seconde face, avec "Love Found A Home" (Christopher Cross), qui nous met de suite l’eau à la bouche avec une très belle introduction et nous replonge dans son univers musical que nous avions tant aimé ! "That Girl" (Christopher Cross / John Bettis) qui paraîtra également en single est plutôt une réussite, avec un côté The Cars évident, cet up-tempo est vraiment cool, dommage qu’il n’ait pas fonctionné, il avait les germes d’un tube ! Et puis pour finir, nous est offert le magnifique "Open Your Heart" (Christopher Cross / Will Jennings), ce morceau vaut peut-être à lui seul l’achat de "Every Turn…". Depuis son premier album, Cross a toujours pris soin de nous enchanter avec la chanson servant de conclusion à ses opus. "Open Your Heart" est la meilleure ballade qui nous est proposée ici, avec un saxophone torride et une guitare qui ne l’est pas moins, le final est à couper le souffle !
"Back Of My Mind" sera son dernier disque pour le label Warner, et sortira un peu moins de trois plus tard en 1988 !
Produit par Michael Omartian
Enregistré et mixé par John Guess
Chant, Guitares, Synthaxe : Christopher Cross
Claviers et Synthétiseurs : Michael Omartian
Basse : Joe Chemay
Batterie : John Robinson
Programmation des Synthtiseurs : Marcus Ryle
Congas sur "Every Turn Of The World" : Paulinho Da Costa
Saxophone solo sur "Swing Street" et "Open Your Heart" : Gary Herbig
Section de cuivres :
Trompettes : Jerry Hey, Chuck Findley, Gary Grant
Saxophones : Gary Herbig, Kim Hutchcroft
Arrangements des cuivres : Michael Omartian
Chœurs : Richard Marx, Portia Griffin, Vesta Williams, Alex Brown, Lynn Davis, Khalid Glover
Vous devez être connecté pour poster un message.
Dernier commentaire :
Je ne peux pas être objectif ... J'aime tout les albums de Cross ...
posté le : June 22, 2020 11:56